Violence obstétricale au Sénégal :
Violence obstétricale au Sénégal : un fléau méconnu Dans un pays où la naissance est traditionnellement une source de joie, de nombreuses femmes sénégalaises vivent une réalité bien plus sombre lors de l’accouchement. La violence obstétricale, un phénomène souvent passé sous silence, est pourtant une expérience commune pour de nombreuses patientes dans les maternités sénégalaises. Qu’est-ce que la violence obstétricale ?La violence obstétricale désigne l’ensemble des mauvais traitements infligés aux femmes pendant l’accouchement. Ces violences se manifestent de plusieurs façons :Violence verbale : insultes, menaces, humiliations. Violence physique : manipulations brutales, procédures médicales réalisées sans consentement. Violence psychologique : manque d’information, infantilisation, déni de la douleur. Violence institutionnelle : conditions d’accueil dégradantes, manque de confidentialité, délais excessifs.
Témoignages de victimes Fanta Seck, une jeune maman de 25 ans, se souvient avec douleur de son premier accouchement : « Arrête de crier, ça ne sert à rien ! » lui aurait lancé une sage-femme, avant qu’une autre ne monte sur son ventre pour accélérer le travail, lui coupant presque le souffle. « J’ai pleuré… Une autre sage-femme m’a dit : « Quand tu faisais ça, tu étais contente, non ? » ».Pour Amsatou, l’accouchement s’est également transformé en cauchemar : « On m’a demandé d’écarter les jambes, mais personne ne voulait me dire à combien j’étais dilatée, malgré mes supplications. La douleur était insupportable, j’ai vomi de fatigue. Au lieu de me réconforter, elles m’ont crié dessus parce que j’avais vomi au mauvais endroit. Quand mon bébé est né, elles ne m’ont même pas dit son sexe ; je l’ai découvert le lendemain. »
Yama Ndiaye raconte aussi son calvaire : « Une sage-femme a commencé à me manquer de respect, à me dire des choses vraiment blessantes. Elle est ensuite sortie, et je l’ai vue s’installer dans une autre salle comme si de rien n’était. Je savais que mon bébé n’allait pas s’en sortir, je pouvais le sentir… »Conséquences sur la santé mentale .Les violences obstétricales ont des répercussions graves et durables sur la santé des femmes :Physiques : douleurs persistantes, complications post-accouchement. Psychologiques : dépression post-partum, stress post-traumatique. Ces témoignages poignants révèlent une réalité difficile à ignorer. Pourtant, la violence obstétricale reste un sujet tabou,
rarement abordé dans les discussions publiques. Il est crucial que ces récits soient entendus, pour que les femmes puissent accoucher dans la dignité et le respect de leurs droits fondamentaux.
Conséquences sociales : une confiance ébranlée. Les violences obstétricales ont des répercussions profondes, au-delà de l’expérience individuelle des femmes. Elles contribuent à une perte de confiance généralisée dans le système de santé, avec des conséquences pouvant aller jusqu’à l’isolement social pour certaines victimes. Témoignage d’un professionnel de santé. Le Dr Ousmane Sarr, gynécologue à Fatick, souligne l’importance de reconnaître et de combattre ce phénomène : « La violence obstétricale est un problème grave qui nécessite une prise de conscience collective. En tant que professionnel de santé, nous devons être formés à la bienveillance et au respect des patients. Chaque femme mérite d’être traitée avec compassion et dignité. »Les causes profondes de la violence obstétricale .Plusieurs facteurs structurels et culturels contribuent à cette problématique :Manque de formation : Certains professionnels de santé manquent de compétences en communication et en gestion de la douleur, ce qui peut exacerber les tensions lors de l’accouchement. Surcharge de travail : Les maternités, souvent débordées, soumettent les sages-femmes à un stress intense, rendant difficile la prise en charge adéquate des patientes. Normes culturelles : Certaines pratiques discriminatoires, profondément enracinées dans les traditions, continuent de façonner les attitudes envers les femmes. Le rôle crucial du pouvoir public. Les autorités sanitaires sénégalaises ont un rôle déterminant à jouer dans la lutte contre la violence obstétricale :Renforcement des normes et règlements : L’adoption de protocoles clairs pour le respect des droits des patientes est indispensable. Contrôle et évaluation : La mise en place de mécanismes de surveillance et de sanctions pour les abus est essentielle pour garantir des soins respectueux. Support psychologique : La création de services d’assistance pour les victimes permettra de soutenir celles qui ont subi des violences. Un appel à l’action collective .La violence obstétricale au Sénégal est une réalité inquiétante qui nécessite une réponse concertée. Il est crucial de restaurer la dignité et le respect que chaque femme mérite pendant l’une des périodes les plus risquées de sa vie. La lutte contre cette forme de violence doit devenir une priorité, non seulement pour les professionnels de santé, mais pour toute la société.